Route des vacances
Qui traverse la Bourgogne et la Provence
Qui fait Paris un p’tit faubourg de Valence
Et la banlieue d’Saint-Paul-de-Vence
Marie-Christine Burricand a cité Bernard Lavilliers, et moi j’ai choisi Charles Trenet, qui j’en conviens, est loin d’être un chanteur de ma génération. Mais ces quelques vers me permettent de rappeler qu’en 1955, quand est sortie sa chanson Nationale 7, celle-ci était longue de 996km.
À son apogée, le réseau routier national a compté près de 50 000 km de voiries. Un patrimoine qui petit à petit a été abandonné par l’État au fur à mesure des déclassements. Dernier épisode en date en février dernier avec le vote de la loi 3DS. 3DS dont un D pour « décentralisation », mais le gouvernement aurait mieux fait de dire « désengagement » car ce qu’il maquille en décentralisation c’est en réalité une opération d’externalisation de ses infrastructures, espérant en faire supporter les coûts futurs à des collectivités territoriales sous-traitantes.
Collectivités territoriales auxquelles parallèlement, et Mr Gascon l’a dit à juste titre, il compte demander 10 milliards d’euros d’économies dans le prochain mandat ! Avec Macron, c’est je déshabille Pierre et je lui demande d’acheter les vêtements de Paul.
C’est pourquoi nous restons très prudents sur ce transfert en montrant notre intérêt pour la gestion de 3 tronçons seulement sur les 7 possibles, et sous conditions j’y reviendrai.
Mais avant, je dois dire que je suis assez étonné M. Gascon de vous voir critiquer notre délibération et nous dire, quelque part, que nous devrions rejeter purement et simplement la gestion proposée par l’État.
Parce que j’ai du mal à comprendre la cohérence quand dans le même temps, ce vendredi à l’hôtel de région, votre ami Laurent Wauquiez va faire voter la reprise par la région de 790km de routes nationales, grosso modo la totalité de ce qui était transférable dans la région. Sans oublier également son funeste projet de doublement de la RN88, entre Le Puy et Firminy, un véritable écocide dont les travaux ont repris hier, et dans lequel la région investit 200 millions d’euros, alors que, je le rappelle, ce n’est pas de sa compétence. C’est de l’argent qui pourrait aller dans le TER !
Et pourtant, à l’heure de l’urgence climatique, c’est l’ensemble des projets routiers qu’il nous faut stopper immédiatement, comme nous l’avons fait par exemple avec l’Anneau des Sciences. Route du littoral à la Réunion, autoroute Castres-Toulouse, contournement de Rouen, ce sont 55 projets routiers en cours de travaux ou d’études, 4500 hectares de terres qui seraient sacrifiées, la superficie de la ville de Lyon. Le tout pour un total avoisinant les 18Mds€, 7 fois le budget alloué annuellement à SNCF pour la régénération du réseau ferré.
Ces chiffres nous montrent qu’il est temps de rompre avec le modèle du tout-voiture qui comporte de nombreuses externalités négatives :
- sa dépendance aux énergies fossiles, qui frappe d’ailleurs de plein fouet les plus pauvres d’entre nous avec l’explosion du prix des carburants ;
- son impact sur la disparition des terres agricoles
- sa responsabilité dans la pollution de l’air, on l’a vu hier avec le vote de la ZFE
Oui il nous faut promouvoir un modèle plus résilient. Il ne s’agit de faire disparaître l’automobile contrairement à la caricature à laquelle quelques-uns ici aiment s’adonner, il s’agit de développer les alternatives dont le potentiel dans nos métropoles est très important.
Nous y travaillons, en doublant les investissements au Sytral sur ce mandat, en consacrant 500 millions d’euros pour les modes actifs, je le dis en passant c’est deux fois plus que le Plan Vélo gouvernemental, et en étant force de proposition pour la création d’un RER métropolitain. Sur ce dossier, la région doit maintenant être au rendez-vous et j’espère très sincèrement qu’elle le sera d’ici quelques mois…
Plus largement, nous attendons également de l’État qu’il prenne ses responsabilités pour des investissements sur le rail : lancement des travaux du CFAL, désaturation de l’étoile ferroviaire lyonnaise, il y a beaucoup à faire !
Quant au réseau routier, nous sommes convaincus que nous pouvons impulser un autre modèle par exemple en y créant des voies réservées, qui favorisent le covoiturage et les transports en commun. Nous pouvons aussi y conduire des projets de requalification, d’apaisement, en jouant sur les vitesses autorisées et les profils.
Alors oui, au vu des enjeux, un transfert de certaines voies pourrait nous intéresser, en l’occurrence la RN6 à Dardilly, l’A43 à Bron et l’A7 au sud de Pierre Bénite, mais avec des conditions fortes qui sont rappelées dans la délibération.
La première, ce sont des compensations financières importantes afin de pouvoir assurer la maintenance et la modernisation des infrastructures, que l’État a laissé vieillir. Jean-Charles Kohlhaas en parlé, nous ne pouvons pas reproduire le cas M6/M7, où je le rappelle la Métropole a dû engager deux millions d’euros récemment sur le Pont de la Brasserie, pour des mesures conservatoires et des travaux de sécurité.
La seconde, ce sont de véritables marges de manœuvres. Le transfert n’a aucun intérêt si l’État conserve toute la maîtrise stratégique, comme c’est le cas avec le statut de route à grande circulation. Sur l’A43 par exemple, nous pourrions valoriser la ligne de covoiturage LANE depuis Bourgoin en ouvrant une voie réservée pour le covoiturage et les transports en commun.
Au fond, cette délibération est une pièce du puzzle de nos ambitions pour les mobilités, un projet de transformation, un projet de planification écologique, auquel notre groupe apporte logiquement son soutien. Je vous remercie.
Matthieu VIEIRA
Conseiller métropolitain