En janvier 2020, un reportage de l’émission Zone Interdite glaçait d’effroi toute la France : «Mineurs en danger, enquête sur les scandaleuses défaillances de l’Aide sociale à l’enfance », ce reportage recensait les cas d’abandon, de maltraitances, les dérives et les violences du système, l’errance de jeunes en « sortie sèche » se retrouvant sans abri…. Dans la foulée, le gouvernement annonce des contrôles dans les foyers, et mandate un rapport auprès du secrétaire d’Etat Adrien Taquet. Les reportages et documentaires s’enchaînent, les témoignages aussi, d’anciens enfants placés ou de professionnel.le.s disant leur mal être.
Voilà le contexte national de la protection de l’enfance en 2020. La Métropole de Lyon n’est pas un territoire pire ou meilleur mais c’est un territoire où la population est plus jeune que la moyenne nationale et c’est alors une collectivité récente qui a repris depuis peu cette compétence au département du Rhône et a dû, dans ses premières années, inventer aussi une nouvelle réponse pour l’accueil des mineurs non accompagnés, enfants migrants pour lesquels les dispositifs n’étaient pas adaptés dans leur dimensionnement et dans leur organisation.
Aujourd’hui la vice-présidente Lucie Vacher vous présente un nouveau schéma directeur de la protection de l’enfance, fixant pour la période 2023-2027, les grandes orientations, objectifs et projets. C’est un schéma construit avec humilité, et porteur de grandes ambitions.
Construit avec humilité parce qu’il s’est élaboré dans la concertation et l’écoute : l’écoute des équipes, la parole des enfants et des anciens enfants placés, la réflexion sur ce qui se fait ailleurs. La posture de la vice présidente est précieuse pour ce sujet qui ne peut s’accommoder de grandes déclarations de principes, ou de dénonciations sans actes, mais exige un travail persévérant avec les agents de terrain et avec les partenaires, en premier lieu la justice et les associations habilitées.
Un schéma porteur de grandes ambitions également, parce qu’avec un budget de 189 millions d’euros, augmenté de 40 millions d’euros par rapport à 2019, c’est une politique majeure de la Métropole.
Alors comment se déclinent concrètement ces ambitions ?
La vice présidente l’a présenté mais je reviendrai sur quelques points.
Tout d’abord, améliorer la prise en charge par des dispositifs adaptés. Depuis le début du mandat, des innovations ont vu le jour :
- pour l’hébergement, dont on sait qu’il est au cœur des problématiques, et des mobilisations solidaires d’habitant.e.s. La Métropole a développé des solutions nouvelles avec les « tiny houses » à Villeurbanne, dans le 9e arrondissement de Lyon ou à Oullins ; auxquelles s’ajoutent les Grandes Voisines à Francheville où s’expérimentent de nouvelles dynamiques d’insertion.
- innovation avec le dispositif « La Station », porté par la délégation logement, qui apporte une solution nouvelle aux jeunes migrants non reconnus mineurs en recours devant le juge des enfants – une solution qui ne répond pas à l’ensemble des besoins ; on ne sait que trop bien la détresse des jeunes actuellement en campement, occupant des squares, des squats ou des gymnases municipaux, alors que les politiques de l’hébergement d’urgence portées par l’Etat s’amenuisent. Mais nous mobilisons nos efforts pour apporter notre part de solution.
- Innovation avec le revenu solidarité jeune, outil pour réduire le risque de chute dans la précarité au moment de la sortie de la protection de l’enfance, et permettre au contraire un accompagnement continu vers l’autonomie.
Ensuite, répondre aux besoins et vulnérabilités spécifiques :
- un plan de lutte contre la prostitution des mineur.e.s, dont la protection de l’enfance est cheffe de file. 360 professionnel.le.s ont été formés à ce jour, et 2 foyers réaménagés pour un accompagnement spécifique.
- le renforcement du dispositif de « centre parental » pour le porter à 50 place et ce afin de pouvoir accueillir de jeunes enfants avec leurs deux parents, comme à Château Gaillard à Villeurbanne.
- Le développement de dispositif accueil relais destiné aux enfants en situation de handicap, avec double habilitation Aide Sociale à l’enfance et MDPH.
Enfin, renforcer la participation :
- la participation des premières et premiers concernés, à travers le comité des jeunes de l’aide sociale à l’enfance et la démarche de recueil de la parole des enfants et anciens enfants placés.
- La participation des communes, qui créent de vraies dynamiques locales autour des lieux d’accueil, qui ne sont pas des sites stigmatisés mais des points autour desquels se tissent des réseaux solidaires, comme autour de la Maison des Quatre Vents à St Germain au mont d’or, lieu dédié à l’accueil de mineurs non accompagnés.
- La participation plus large des citoyennes et citoyens engagés à travers le renforcement de l’action de parrainage, comme celle de l’UDAF et Proxité, qui crée des binômes de mentorat pour favoriser la réussite scolaire et l’insertion professionnelle des jeunes en fragilité.
L’ambition que vise ce schéma, avec ses objectifs clairement définis, est la protection, et l’accompagnement vers l’autonomie. La prise en compte de toutes les vulnérabilités, les risques et fragilités, et la mise en place de mesures pour étayer le parcours de ces jeunes, leur permettre l’accès à la citoyenneté, à l’émancipation, et le respect de leur dignité.

Alors tout n’est pas simple- et l’action menée ce jour par des travailleuses sociales devant la Métropole nous montre combien ces professionnelles continuent de subir des situations douloureuses pour lesquelles les rattrapages de moyens ne sont pas toujours suffisants à ce jour. Mais avec ce schéma directeur une stratégie claire et concrète est mise en place pour leur permettre de relever la tête, et pour que nous soyons collectivement fier.e.s de la protection apportée à l’enfance en danger, et je tiens à en remercier l’ensemble des architectes et artisans.
Le groupe Les Écologistes votera favorablement cette délibération.
Yasmine BOUAGGA
Conseillère métropolitaine